Génocide rwandais : Callixte a tué la famille de son meilleur ami, mais Dieu a changé la haine en pardon
Au Rwanda, Callixte a assassiné la famille de son meilleur ami. Mais Dieu a conduit leurs familles au pardon et à la réconciliation.
En 1994, le Rwanda a sombré dans la haine et l’horreur. 800 000 personnes ont été tuées en 100 jours. Chaque minute de ces 100 jours, 6 hommes, femmes et enfants étaient abattus, le plus souvent à la machette. Ce génocide historique visait la destruction des tutsis par les hutus. La violence déferlait au sein-même des familles et du voisinage.
L’organisation humanitaire chrétienne internationale World Vision témoigne de l’histoire vraie de Callixte, hutu, et Andrew, tutsi. Voilà comment le génocide a transformé ces amis en ennemis et comment la puissance du pardon les a libérés de la haine.
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On s’accorde désormais sur le fait que ce projet de génocide était latent des décennies avant le déferlement de haine. En 1916, les belges colonisent le Rwanda. Dès les années 30, ils introduisent les cartes d’identité ethniques, divisant les peuples par tribus, les hutus, les tutsis et les twas. Les hutus étaient alors majoritaires mais les tutsis étaient favorisés par les belges qui les considéraient comme étant supérieurs. Les rois tutsis gouverneront jusqu’en 1959, époque à laquelle les paysans lancent la « révolution hutu » qui aboutit à l’abolition de la monarchie.
En 1963, une guerre civile éclate entre hutus et tutsis, entrainant la fuite des tutsis vers les pays voisins. Au pouvoir, les hutus multiplient les messages de haine à l’égard des tutsis, appelant à tuer les « cafards ».
Le 6 avril 1994, l’avion du président hutu est abattu. Les 100 jours qui suivent verront la mort d’un cinquième de la population rwandaise, jusqu’à ce que le Front Patriotique Rwandais, composé de hutus et de tutsis modérés, prenne le pouvoir et mette fin aux massacres.
Andrew et Callixte ont toujours habité dans le même village. Andrew se rappelle de ce lieu de « paix et d’harmonie ». Comme eux, leurs parents étaient déjà amis :
« Son père était un ami très proche du mien. Nous avons grandi dans le même village. Nous étions des amis très proches. »
Mais en avril 1994, tout bascule, comme le raconte Andrew :
« Les choses ont tout à coup changé et les gens ont commencé à s’entretuer. Les gens avaient perdu la tête. »
Pour Andrew, les gens étaient devenus « comme des animaux« . Andrew tente de protéger sa famille, en vain. Sa femme, Madrine, a survécu mais elle a perdu sa mère, son père et ses 5 frères et soeurs. Parmi les assassins, il y a Callixte.
« Ils ont fait de leur mieux pour se cacher. Certains sont même venus chez moi. Ils ont été découverts et tués. »
À l’issue des tueries, devant l’ampleur du nombre des auteurs du génocide, des tribunaux sont mis en place. Les villageois y amènent les personnes impliquées dans les massacres. Andrew y amène Callixte. Il sera emprisonné pendant 13 ans.
Dans le village d’Andrew, l’heure est à la haine :
« La haine s’est développée parmi les habitants de ce village. Ceux qui ont survécu contre ceux qui ont tué. Les amitiés qui avaient caractérisé ce village ont disparu. »
Marcella, l’épouse de Callixte, n’adresse pas la parole à Madrine. Leurs enfants n’ont pas le droit de jouer ensemble. Pour Marcella, c’est « la haine entre [leurs] maris » qui les a « tenues séparées ». Mais les épouses sont toutes deux bénévoles pour World Vision. Madrine raconte :
« Au début, je la haïssais à cause de ce que son mari avait fait. Après m’être préparée et avoir écouté à l’église, je suis revenue à la raison. »
Pendant ce temps, en prison, Callixte commence à lire la Bible. C’est là que Dieu se révèle à lui.
« C’est à ce moment-là que j’ai commencé à me repentir de mes péchés, chacun de mes péchés. Je me suis principalement concentré sur le fait de participer au génocide. [...] Quand j’y réfléchissais, [...] je me mettais à pleurer. »
Callixte se met à composer des chants. Il y parle de paix, d’amour, d’unité et de réconciliation. Il déclare qu’à travers son ministère, 8600 prisonniers se sont repentis.
« Ces chansons ont en fait touché la vie des gens, principalement des prisonniers, et ils ont commencé à changer leurs habitudes. [...] Je soulignerai toujours le fait que Dieu m’a dit que celui qui demanderait le pardon serait pardonné. »
Dans le village, la famille de Callixte et la famille d’Andrew se sont réconciliées. Callixte raconte :
« Ils m’ont pardonné, mais surtout Andrew et sa famille. Ils m’ont pardonné et ils m’ont sorti de prison. »
Marcella raconte que c’est lors d’un prédication à l’église qu’ils ont choisi de se réconcilier :
« Nous sommes allés à l’église et avons entendu le pasteur prêcher. Un jour, nous étions tous au même service. C’était comme si le pasteur nous parlait. Il a regardé droit dans nos cœurs. Après l’église, nous avons dit: ‘Nous devons parler.’ En 2010, nous sommes revenus ensemble. Depuis, nous sommes restés proches. »
Callixte et Andrew sont désormais visiteurs de prison. Ils parlent de réconciliation aux auteurs du génocide. Les deux familles sont associées dans le commerce. Les épouses, dans une entreprise de café, les époux dans l’élevage. Le fils ainé de Callixte va épouser la fille d’Andrew.
« En tant que famille, nous soutenons leurs projets et nous aimerions tous vous inviter au mariage. Nous continuons à dire que c’est Dieu qui a fait cela. Avec la force humaine, cela n’aurait pas été possible du tout. »
L’actrice américaine Patricia Heaton les a rencontrés :
« Quand je suis entrée dans cette maison et que je les ai vus assis ensemble, je les ai salués et Andrew m’a pris la main. Je l’ai regardé dans les yeux et je me suis immédiatement effondrée. L’amour émane de lui, la paix, cette famille prospère tellement. [...] Ils ont été complètement bénis par leur capacité à abandonner la vengeance. Cela rétablit votre foi en l’humanité et vous montre ce que les gens peuvent faire lorsqu’ils travaillent ensemble. Nous devrions vraiment surmonter nos différences pour nous entraider. »
M.C.
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